Yo les rôlistes.
Ça faisait un sacré bout de temps que j’avais laissé Carnival of Time en pause. On parle d’un an et demi de hiatus, pour grossir le trait. Et pour celles et ceux qui étaient habitués à des mises à jour mensuelles, je comprends que la coupure ait pu paraître soudaine et ébranler certains espoir vis-à-vis de l’avancée du projet, à tort ou à raison.
On m’a déjà fait part de quelques inquiétudes sur le serveur Discord, auxquelles j’ai répondu partiellement. Mais maintenant, il est temps de reprendre les choses en mains, et de donner à tout le monde – moi compris – de la visibilité sur la situation actuelle et le futur du projet.
Les raisons du hiatus
Des raisons, il y en a plusieurs, et – rassurons immédiatement tout le monde là-dessus – aucune d’elle n’est un burnout.
J’ai été aussi actif et productif que d’habitude pendant ce temps mort ; mes efforts ont simplement contribué à d’autres choses auxquelles j’ai choisi d’attribuer plus d’importance.
Mais alors du coup, pourquoi cette mise en pause complète ? Pourquoi cette campagne a aussi soudainement baissé dans mes priorités ?
Raison 1 : La sortie de Tears of the Kingdom
Le jeu est sorti en mai 2023, à peu près au moment où je finissais d’écrire le premier chapitre de Tales of Courage. Et ensuite, je n’ai plus donné de nouvelle. Évidemment, ce n’est pas une coïncidence.
Compiler toutes les théories et officialisations des chronologies et des histoires des jeux Zelda, pour en donner un aperçu globalisé dans le premier chapitre de Tales of Courage, ça n’a pas été facile. C’était un travail plein de compromis. Et sans spoiler, disons que Tears of the Kingdom rebat les cartes très sévèrement, à propos de la mythologie Hylienne.
En gros, son propos invalidait complètement ce que j’avais agencé tant bien que mal pour coller aux autres jeux de la série. Donc soit j’ignorais le dernier gros opus en date, soit je révisais le chapitre que je venais d’écrire en profondeur. Autant vous dire que c’était pas la meilleure des nouvelles.
Ce jeu a été, et est encore, synonyme de travail et de compromis supplémentaires.
Rien de dramatique, bien sûr. Une goutte d’eau dans l’océan, même, vu la quantité de taff que j’avais prévu d’accomplir de toute façon.
Mais voilà, l’écriture de ce deuxième manuel démarrait plutôt mal. Et je sentais que laisser passer un peu de temps après la sortie du jeu – pour que la communauté de fans théoriciens l’intègrent dans leurs réflexions, débattent et s’accordent – allait largement m’aider. Je pense même maintenant que c’était nécessaire, et que si j’avais essayé de réviser le chapitre à l’époque, j’aurais dû le reprendre à plusieurs reprises encore après.
Raison 2 : Des tentatives d’écriture infructueuses
Tales of Courage, c’est aussi, pour plus de la moitié du livre, une exposition des trames narratives principale et secondaires de la campagne. J’étais tout-à-fait conscient que je ne pourrai pas faire tenir TOUT ce que j’ai instancié depuis les 9 ans que je fais jouer ce JDR. Et ça m’allait très bien, comme contrainte d’écriture.
J’ai juste travaillé à limiter mon récit au minimum vital, pour que ça tienne dans le bon nombre de pages et que toutes les informations importantes soient là. C’est tout. Mon plan était le suivant :
- Chaque page allait raconter un morceau de l’histoire principale, du point de vue d’un personnage en particulier.
- Pour que le MJ ait une idée de la façon dont pense et s’exprime le personnage, la narration devait changer de style (solennel ? noble ? familier ? WTF ?) et de contenu (mauvaise foi, point de vue biaisé, etc.)
- La succession des récits individuels, pris dans l’ordre, devait permettre l’assimilation plus générale du scénario
Je sais que je m’en sors pas mal pour écrire des dialogues ou des discours ancrés dans la subjectivité d’un personnage. Dans l’idée, cette solution jouait donc sur mes points forts, variait les styles pour ne pas ennuyer, transmettait sans le dire la personnalité des PNJ, et permettait de transmettre beaucoup d’informations en peu de lignes.
Mais en pratique, après avoir tenté d’écrire les 10 premiers personnages, je me suis vite rendu compte d’une évidence : le résultat est imbuvable. J’étais en train d’écrire de la daube et il fallait que j’arrête.
Alors pourquoi ce plan ne marchait pas ?
Eh bien tout simplement parce qu’un récit agréable à lire, ce n’est ni une documentation, ni un livre de règles, ni un résumé. C’est une narration fluide, qui se consomme et se comprend sans effort ni difficulté particulière. Il y a – je crois – besoin de répéter et d’insister sur certaines informations. Il y a besoin de longueurs, aussi, de temps en temps, et de reposer le lecteur.
Bref, je n’avais pas l’espace pour conter le récit de la campagne correctement, et ma « solution », en fait, c’était la même que celle d’un agent de gare japonais qui entasse les voyageurs dans le train par la force. Ça « marche » oui, mais c’est pas le top du confort.
Bref, tout était à réécrire et repenser, finalement. Donc dans l’immédiat, j’ai préféré arrêter le massacre.
Raison 3 : Un potentiel d’illustrateur encore trop jeune
J’ai justifié uniquement l’arrêt de Tales of Courage, jusqu’à présent, mais n’oublions pas que même le premier manuel, Rules of Wisdom, n’est pas totalement fini. Il faut encore l’illustrer !
Et si ce travail aussi a été stoppé, c’est parce qu’illustrer Rules of Wisdom aurait freiné mes progrès en dessin.
Dit comme ça, ça doit sonner bizarre, mais en réalité c’est simple à expliquer :
Depuis 2 ans, mon niveau en dessin fait des progrès vertigineux, qui sont dus à un travail d’exploration.
En gros, je me permets d’essayer, petit à petit, des techniques différentes et des nouveaux formats. La raison d’être de la plupart de mon contenu graphique actuellement, c’est le défi et l’exercice. Des fois je me plante, des fois j’ai des déclics cools, et dans tous les cas, j’avance.
Or, illustrer un livre avec une direction artistique qu’on espère être à peu près constante et stable, eh bien… c’est l’inverse de l’exploration. C’est de la stagnation. Et c’est le meilleur moyen de tuer dans l’œuf mon potentiel en tant qu’illustrateur. Je n’ai évidemment pas envie de ça !
Rules of Wisdom attendra donc que je me sente beaucoup plus stable et construit en tant qu’artiste.
Et histoire que vous saisissiez bien à quel point j’ai level up, voici :
Repenser Tales of Courage
Les problèmes ont été identifiés. Super ! Et maintenant ?
Tales of Courage s’annonce être un sacré sujet. Déjà, clairement, je vais devoir rattraper un peu tout ce qui s’est dit depuis Tears of the Kingdom pour être à jour sur les tendances actuelles vis-à-vis du lore général de la série Zelda. Et partant de là, très possiblement, il va falloir entamer une réécriture du premier chapitre.
Je me suis demandé à plusieurs reprises si ce n’était pas mieux de faire la sourde oreille et d’ancrer ce manuel comme datant d’avant Tears of the Kingdom. Après tout, Rules of Wisdom, lui, est déjà antérieur.
Mais non, je préfère inclure le dernier Zelda en date à la contemporanéité de Tales of Courage, et donc assumer les écarts de connaissance entre les manuels.
Ensuite, le gros sujet, évidemment, c’est la bonne moitié du bouquin consacrée à l’intrigue principale de la campagne. Comme je vous l’avais dit, je ne crois qu’il soit possible de narrer et d’expliquer tout ce que je voulais de façon digeste en un seul livre.
Donc en fait, j’ai deux possibilités pour remédier à ça :
- Je casse la trilogie en sortant un Tales of Courage 1 et un Tales of Courage 2
- Je narre beaucoup moins de choses que prévu, mais d’une façon satisfaisante
Et comme je suis un être humain AUSSI et qu’au bout d’un moment, j’ai besoin de voir le bout du tunnel, j’ai préféré opter pour la solution qui me retire du travail. Donc la deuxième.
Tales of Courage va finalement être très, très léger dans son explication de la trame de la campagne.
Certains de vous se demandent peut-être pourquoi partir sur un Tales of Courage de 300 pages ne serait pas une possibilité. La raison est technique et dépend des choix d’outils que j’ai faits au début du projet en concevant HyTeX. Pour faire simple, si je commence à dépasser les 120 pages, malgré toutes les optimisations à ma disposition, je risque de dépasser la limite de temps de compilation du pdf.
C’est une contrainte de départ que je suis obligé d’assumer à ce stade.
Peut-être que le détail de ce concept fera l’objet d’un prochain article, si je définis un peu mieux mon idée. Mais ce que j’envisage, c’est d’ouvrir le scénario aux MJ.
Autrement dit, au lieu de transmettre quelque chose comme : « Francis est marchand de tapis depuis 7 ans. Il était là au moment où Alicia est morte, et a vu le coupable. C’est lui qui a poursuivi Marcel jusqu’à Yerres-en-Brumes pour la venger, et blablabla » je transmettrai quelque chose comme : « Francis est lié à l’affaire de Marcel et Alicia. On se demande bien comment ! »
Ouais, c’est un peu sec, dit comme ça.
Mais en réalité, si j’arrive à amener élégamment ces ouvertures, ça sera exactement dans l’esprit de ce que Carnival of Time est déjà : un terrain d’expérimentations libre, dans lequel chaque MJ va de toute façon créer son petit univers rien qu’à lui, pour répondre aux besoins spécifiques de la campagne qu’il est en train de mener.
Pour rappel, jusqu’à présent, je m’apprêtais à écrire 70 pages de scénario précédées de « MJ, n’hésitez surtout pas à ne pas suivre le scénario pour y insérer vos twists ! » Donc franchement, de vous à moi, est-ce que ce nouveau format n’est pas finalement moins paradoxal que l’ancien ?
À méditer.
Illustrer Rules of Wisdom
Comme expliqué précédemment, ma priorité absolue est de progresser en dessin, et donc de faire des défis et des exercices à plein régime. Donc non seulement les illustrations du manuel ne seront pas pour tout de suite, mais en plus de ça, je vais repousser aussi la mise en place d’un plan de production de ces illustrations.
C’est du bon sens. J’attends d’être à mon meilleur niveau avant de faire des choix qui relèvent de la direction artistique.
Maintenant, la question, c’est : quand est-ce que je serai prêt à illustrer Rules of Wisdom ? Est-ce que j’ai une estimation pour ça ? Est-ce que j’ai une métrique ?
La réponse, assez étonnamment, est « oui ».
Il n’y a rien de sûr, mais je pense que début 2026, j’en aurai marre de faire des exos et des challenges, et je me lancerai plus volontiers dans Rules of Wisdom. Mais pour bien comprendre d’où cette prévision sort, il faut que je pose le contexte.
- Depuis septembre 2023, je ne suis pas juste client d’ateliers de dessin sur Paris. Je fais carrément partie du staff.
- C’est-à-dire que j’ai convenu un accord informel avec des organisateurs qui me permet de venir à toutes leurs séances sans payer, tant que j’aide à installer et désinstaller la salle. C’est 20 € d’économisés à chaque fois, en gros.
- Ce deal me donne accès à un volume horaire de dessin de modèle vivant similaire à celui d’un étudiant en art. Et sans me ruiner.
- J’en suis déjà à presque 200 heures d’XP, en tout. Regardez ce qu’en dit l’ami Chat GPT :
Moralement, je suis obligé de profiter à fond de cette opportunité miraculeuse sortie de nulle part, qui EN PLUS me permet de réseauter à fond avec d’autres artistes et d’apprendre d’eux aussi.
La reconduction du deal n’est pas tacite. Il peut se passer plein de choses qui me fassent perdre ce privilège. Mais si j’arrive à en profiter encore en 2025, au même rythme qu’actuellement, bah… j’aurai effacé une grande partie de la différence entre moi et quelqu’un qui a suivi un cursus dans les Beaux Arts, en fait. Et à titre personnel, je veux absolument saisir cette chance.
En tout cas, une fois l’objectif des 300 heures d’XP atteint fin 2025, je pense que j’en aurai marre et qu’il sera temps de rompre l’accord et de réattribuer le temps que ça me prenait vers Rules of Wisdom. Le rythme que les séances de dessin m’impose est assez vénère, et j’en suis déjà fatigué, honnêtement. Donc il y a peu de risque que je tienne encore le coup en 2026 de toute façon. ^^’
Autre chose importante à signaler aussi : Carnival of Time aura uniquement des illustrations faites en dessin traditionnel, c’est-à-dire sur du vrai papier avec des vrais crayons. C’est une quasi-certitude. L’ordinateur n’interviendra qu’on post process, éventuellement.
La raison ?
Je suis meilleur en traditionnel, déjà. Et je trouve ça plus motivant de dessiner quand ça n’est pas devant un écran. C’est ce que la pratique intense que je vis actuellement m’a appris sur moi-même. Donc voilà, vous pouvez oublier les process sur tablette graphique expliqués dans d’autres articles, ils ne seront pas suivis.
Toujours plus de dérives et de ralentissements
Aussi étonnant que ça puisse paraître, j’ai aussi une vie, d’autres passions et un métier avec tout ça !
Par exemple, l’an prochain, c’est à peu près sûr que je vais me remettre à la musique, et faire avancer d’autres projets de vie externes. Alors attention, hin, à tout moment je peux lier ça à Carnival of Time – typiquement, si je me remets sur FL Studio, ça n’est pas impossible du tout que je me mette à vous proposer des pistes audios pour des PNJ de la campagne – mais globalement, le rythme dans l’écriture sera plus chill que ce que j’ai pu faire en 2021 et 2022, où vraiment ça avançait de fou chaque mois.
En plus, le projet a pris de la dette technique.
Avant même de me remettre sur Tales of Courage, il va falloir que je vérifie que HyTeX et Hyliaht’z fonctionnent toujours bien, qu’ils soient à jour, etc. Ça va être mes premiers sujets de reprise, en fait.
Et ensuite seulement, une fois que mes bases sont stables et sereines, là oui, je partirai sur les recherches pour réécrire le premier chapitre, etc. Mais cette réécriture ne démarrera a priori qu’en 2025, maintenant.
Donc oui, tout va être plus lent. Les probabilités que le projet aille jusqu’au bout sont drastiquement réduites, par rapport au plan « une année = un livre » que j’appliquais avant.
Mais peu importe.
Même si ça avance par petits pas, tant que le créatif que je suis y trouve du fun, et que la campagne se joue (merci d’ailleurs à tous les MJ de continuer de faire vivre ça et d’amener de nouveaux joueurs. C’est vraiment dingue), le projet vivra et j’en serai fier à toute étape.
Que les Déesses vous protègent, et des bisous.
Ciao !